Joyeux anniversaire

Tu seras probablement étonné quand tu recevras cette lettre. Tant pis. Cela fait parfois du bien d’être surpris par la vie, non?
Quatre ans. Quatre ans entre maintenant et notre dernier coup de fil. Un coup de fil presque ordinaire. Je t’ai souhaité ton anniversaire. Tu m’as parlé de ta fille qui rentrait en CP. Je t’ai parlé de mon boulot. Ce boulot au Canada qui me trainait si loin de toi. Tu as râlé. Pour ça. Pour d’autres choses. Comme d’habitude. Rien ne laissait présager ces quatre ans de silence.
Après cet appel, il y a bien eu quelques messages, par-ci, par-là. Puis plus rien. La flemme. S’il veut de mes nouvelles, il décrochera son téléphone. Certainement que tu as dû te dire la même chose. Et nous en sommes restés là.
Au départ, je me suis dit que cette pause nous faisait du bien. J’étais à une étape de ma vie où j’avais besoin de sérénité et de solitude. Tu n’as pas été le seul à avoir été éjecté comme ça. Si ça peut te rassurer.
Mon anniversaire est passé. Le tien, à nouveau, aussi. Les fêtes de fin d’année. Plusieurs fois. Même pas une bonne année entre nous.
Je n’avais pas envie d’en recevoir de toute façon. Ma vie était merdique.
Je me disais l’an prochain. L’an prochain, tout rentrera dans l’ordre. Une amitié de trente ans, ça peut bien être mis en stand by de temps en temps. Ça ne peut pas s’éteindre comme ça.
Puis t’as commencé à me manquer. Tes blagues pourries, ton rire. Même ta femme. Pourtant, tu sais à quel point je l’apprécie. Déjà deux ans sans nouvelles.
Comment on fait pour renouer après deux ans ? Comment t’allais réagir ? Tu m’avais peut-être oublié. T’étais peut-être déjà passé à autre chose. J’ai encore attendu. Encore. Attendu.
Et nous y voilà. Quatre ans.
J’espère que tu vas bien. Moi, je vais mieux. J’avais envie de te le dire. Au cas tu penserais encore à moi par moment.
Je pense à toi souvent.
À nos jeux dans la neige. À nos escapades dans la forêt. À nos premières cuites. À la coloc. Au voyage en Grèce. À ce dernier rendez-vous qui n’a pas eu lieu. Que tu as annulé à la dernière minute. Sans m’expliquer pourquoi. J’aurais dû avoir la patience de t’attendre. Je n’étais pas en droit d’exiger quoi que ce soit de toi, sous prétexte que tu étais mon meilleur ami.
Pas un jour ne passe sans que ça rallume un souvenir de toi.
Je pense à notre adolescence, cette période où on était si proches que tout le monde nous croyait ensemble. Oui, on était ensemble mais pas comme ils le pensaient. On était bien. Tu étais celui à qui je racontais tout. Les chagrins d’amour. Les disputes avec ma mère. Les trois sur vingt en maths.
Je n’ai pas grand-chose à t’offrir aujourd’hui. Juste ces quelques mots qui ne valent pas beaucoup sans doute.
Pardon.
Tu as tellement compté pour moi. Comment j’ai pu. Comment on a pu. Je n’arrive pas à t’oublier. Mais je ne sais pas comment te faire réapparaître. Je ne suis pas magicienne.
J’ai eu tellement de mal avec ma propre existence que j’en ai délaissé la tienne. Je m’en sors maintenant. Je suis heureuse. Je pense.
Ne te crois pas obligé de répondre à ma lettre.
Je voulais juste que tu saches.
Tu as compté pour moi. Chaque vie compte.
Joyeux anniversaire.


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